« Chapitre 2. Rapport expressif au travail »

De Projet de recherche sur l'auto-exploitation collective
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Référence : Ferreras Isabelle, « Chapitre 2. Rapport expressif au travail », dans Critique politique du travail. Travailler à l’heure de la société des services, sous la direction de I. Ferreras. Paris, Presses de Sciences Po, « Académique », 2007, p. 47-79.

Thèses et questions de recherche[modifier]

Questions de recherche : quel rapport l’individu qui travaille entretient-il avec cette expérience que constitue le travail ? (p. 1)

Objectif de la recherche : Ce chapitre comporte deux moments : le premier situe l’interrogation au cœur de cet ouvrage dans le fil des traditions qui l’ont traitée ; ensuite, nous examinerons le cas critique que constituent les caissières de supermarché.

Thèse centrale : Le sens donné au travail ne se limite pas à sa seule valeure instrumentale (le salaire qu'on en retire), au contraire, l'article démontre que bien que présent, ce rapport instrumental est systématiquement accompagné de raport expressif (autonome et endogène).

Sous-thèses :

Méthodologie : généalogie des théories traitant du sens du travail (généralement compris comme purement instrumental, ce que l'autrice cherche à contredire. La seconde partie du chapitre s'appuie sur une recherche qualitative avec des personnes travaillant à la caisse fans des supermarchés.

Arguments et concepts[modifier]

Satisfaction et degré d’influence sur l’entreprise : En effet, l’enquête établit qu’un tiers des Américains (le « discontent third ») n’est pas satisfait de son expérience de travail : ils disent démarrer leur journée en ayant le sentiment de préférer ne pas devoir aller au travail (25 %) et estiment que les relations entre les employés et le management sont mauvaises (7 %) ou passables (22 %). On constate une distribution similaire sur la question de la loyauté des employés par rapport à l’entreprise et sur celle de la confiance que les employés ont dans le fait que l’entreprise tienne ses promesses. Les données récoltées par Freeman et Rogers leur permettent d’établir une forte corrélation entre les réponses exprimées par le « tiers mécontent » et la satisfaction avec le degré d’influence du travailleur au travail/sur son travail [Freeman et Rogers, 1999, p. 45-47]. (par 44)

Satisfaction et classe sociale : Freeman et Rogers montrent que la proportion de mécontents est plus importante dans la catégorie des plus bas salaires, c’est-à-dire les moins éduqués, les minorités ethniques (dans le cas des États-Unis, travailleurs noirs et latinos en particulier) et les travailleurs manuels (les ouvriers). Ainsi, les auteurs font remarquer que dans une certaine mesure la satisfaction au travail se reflète dans le niveau de revenu. Il nous semble clair que cette corrélation témoigne de la nature des travaux pourvoyeurs de bas salaires : bien souvent répétitifs, peu créatifs, physiquement épuisants, ils offrent moins de liberté dans leur exécution et ne permettent pas beaucoup de marge de manœuvre quant au fait d’y « avoir son mot à dire ». (par 46)

Expressivité : Pour le philosophe, l’expressivité est bien la caractéristique fondamentale de l’humain car c’est elle qui exprime notre subjectivité. (par 55) Le rapport expressif (au travail) capture donc en un mot le fait que, comme le dit Taylor, au-delà de l’effectivité de l’action, l’individu exprime sa subjectivité. Nous cherchons donc ici à éclaircir ce que l’expérience du travail exprime aux yeux de l’individu. (par 56)

Rapport expressif autonome : Celui-ci n’est pas tant lié au contenu des tâches du travail qu’à l’expérience que le travail joue dans la vie des employés. Le sens que prend le travail dépend dans ce cas d’une série de facteurs liés à l’expérience du travail. Nous avons repéré trois registres expressifs (expressions du sens du travail) majeurs. Ils se combinent chaque fois de manière propre à la caissière en complément du registre instrumental qui reste toujours présent : travailler c’est « être inclus » dans un tissu social, c’est « être utile » à la société, c’est « être autonome » dans sa capacité à mener sa vie. (par 57)

Nous parlerons dans ce cas de relation expressive autonome au travail, parce que la logique expressive est autonome par rapport aux caractéristiques du travail fourni. Le sens n’est pas lié strictement au contenu des tâches mais à l’expérience du travail. En effet, il est raisonnable de penser qu’un autre emploi pourrait être le support d’un même rapport expressif au travail. (par 60)

Rapport au travail expressif endogène : Le concept de rapport expressif endogène permet d’évaluer dans quelle mesure le travailleur trouve sens dans le contenu même de son travail. Ce quatrième et dernier registre expressif, absent dans le cas du rapport expressif autonome, est donc ici central : travailler, c’est « faire un travail intéressant » (par 80)

Conscience ouvrière : Pourtant, malgré ces conditions que l’on peut penser particulièrement propices au développement d’une relation purement instrumentale au travail, un rapport expressif au travail – souvent très fort – s’est noué. C’est pour le qualifier que Touraine parlait de « conscience ouvrière ». C’est la culture ouvrière, ensemble de normes partagées par la communauté des travailleurs et leur famille, qui constituait le plus important véhicule de normativité en adéquation avec le milieu de travail. (par 90)

Conclusion critique[modifier]

Dans le cas de notre recherche, j’aurais tendance à dire que nos répondant.es adhère pas tant à ce rapport expressif autonome, au contraire, plusieurs se définissent plutôt comme étant en opposition avec le travail, c’est-à-dire que dans le cas d’un travail salarié qui ne correspondrait pas à leurs valeurs, ces personnes entretiennent un rapport strictement instrumental au travail : « je travaille pour subvenir à mes besoins »